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Les pilules de la réussite (1/2) – Le dopage placébo

Besoin d’un coup de pouce pendant vos révisions ? Peut-être avez-vous pensé aux médicaments, peut-être même n’avez-vous pas fait qu’y penser.

Aucune pilule n’est estampillée « réussite académique » : le NZT, fameuse pilule qui décuple les facultés cognitives dans le film Limitless, n’a pas son équivalent dans la réalité. Pourtant certains étudiants prennent des médicaments pour se donner un coup de fouet, diminuer leurs besoins en sommeil, lutter contre le stress à l’approche des examens…

S’il vous arrive d’errer sur les forums étudiants pendant les périodes de révision, vous aurez probablement lu des avis contradictoires sur telle ou telle pilule. Cet article est le premier d’une série visant à clarifier tout ça. Quelles sont les médicaments prisés par ces étudiants ? Comment fonctionnent-ils ? Quels sont les risques associés à leur consommation ?

Ce premier article est consacré aux compléments alimentaires, en particuliers ceux censés améliorer vos performances intellectuelles.

  1. Un marché pseudo-médicamenteux en pleine expansion
  2. Les compléments alimentaires : ça marche ?
  3. Le cas des compléments alimentaires « spécial étudiant »

Vous pouvez lire la suite ici.

Les pilules de la réussite (2/2) – Les psychostimulants

Un marché pseudo-médicamenteux en pleine expansion !

Certaines pilules sont plus faciles à se procurer que d’autres, à commencer par les compléments alimentaires. Vous pouvez les acheter sur internet, en pharmacie sans ordonnance, voire même pour certains dans les grandes surfaces.

Le marché des compléments alimentaires a littéralement explosé en Europe et en Amérique du nord, avec différentes modes successives : vitamines, oligoéléments, acides-aminés et plus récemment les oméga-3. A titre d’illustration, en 2006, un français sur cinq a consommé un complément alimentaire, 210 millions de boîtes ont été vendues, et le marché représentait plus d’un milliard d’euro. Les laboratoires pharmaceutiques se sont évidemment jetés sur cette nouvelle manne, qui connait une forte croissance avec en plus des marges élevées, tant pour les industriels que pour les distributeurs (plus d’infos sur le marché français des compléments alimentaires).

C’est d’autant plus intéressant pour les industriels, que les compléments alimentaires ne sont pas des médicaments. Pourquoi ? Parce qu’à la différence des médicaments, ils n’ont pas d’action pharmacologique et donc pas d’utilité médicale (je reviendrai sur ce point dans la suite de l’article). Les compléments alimentaires n’ont qu’une action physiologique, autrement dit, ils apportent quelque chose qui est normalement apporté par l’alimentation. D’ailleurs, tout bon laboratoire qui se respecte doit indiquer sur la notice des compléments alimentaires qu’ils ne remplacent pas une alimentation variée et équilibrée, qu’ils n’ont aucun intérêt curatif ou préventif (autrement dit, cela ne guéri pas et cela n’empêche pas d’avoir des maladies). Il est même légalement interdit aux industriels de dire le contraire.

Cependant, vous aurez remarqué qu’ils trouvent toujours des astuces, des expressions suggestives pour vous faire croire que cela marche comme un médicament voire que cela marche tout court : non seulement l’aspect est proche d’un médicament (gélule, comprimé… dans une boite type médicament…), mais le message est manipulateur et s’appuie sur le manque de connaissances des consommateurs. Ces laboratoires utilisent les techniques des charlatans des siècles passés : pseudo études cliniques, pseudo jargon scientifique (‘actif’, ‘vitalité’, ‘jeunesse’…)… Par exemple, sous prétexte que « la vitamine E et le sélénium sont reconnus pour leurs propriétés antioxydantes », le laboratoire Oenobiol dit que le complément alimentaire Oenobiol Intensif Nutriprotection est « issu de la recherche scientifique » (lisez le vous-même ici).

Enfin, pour se protéger des accusations de publicité mensongère et pousser un peu plus à la consommation, les laboratoires indiquent généralement qu’il faut faire une cure de plusieurs semaines pour voir les premiers résultats, voire même renouveler la cure « si besoin ».

Ce qui est intéressant, c’est que comme les compléments alimentaires ne sont pas considérés par la loi comme des médicaments mais comme des denrées alimentaires, ils ne sont pas soumis à la règlementation des médicaments. A ce titre, il est donc très facile de faire de la publicité pour les compléments alimentaires et de les vendre non seulement dans les pharmacies mais aussi et surtout dans les grandes surfaces, les magasins « bio » etc (glissons en passant qu’il n’y a rien de moins « naturel » qu’un complément alimentaire).

En réalisant toutes les combinaisons possibles de vitamines, oligo-éléments etc… les laboratoires proposent aujourd’hui des compléments alimentaires pour toutes les situations : vieillissement, fatigue, stress, ménopause, minceur, digestion, problèmes urinaires, sommeil, articulation, vision, peau, libido, cholestérol… Mais un seul type de compléments alimentaires nous intéresse ici : ceux qui prétendent améliorer votre mémoire et vos capacités cognitives.

Les compléments alimentaires : comment ça marche ?

Pour fonctionner, notre corps a besoin de deux types de molécules : les molécules non-essentielles, qu’il sait fabriquer à partir de molécules « banales » (sucres, graisses, protéines) et les molécules essentielles, qu’il ne sait pas fabriquer. Il faut donc que votre alimentation apporte ces molécules essentielles. On en distingue principalement quatre types :

  • Les vitamines : par définition, votre corps n’est pas capable de fabriquer une vitamine, mais il en a besoin pour faire fonctionner certaines enzymes. Il y a une exception à cela : la vitamine D n’est pas une vitamine mais une hormone, car votre corps sait la fabriquer en grande quantité (sauf chez les personnes âgées).
  • Les oligo-éléments : ce sont généralement des éléments simples, comme le fer, le magnésium, le sélénium etc
  • Les acides-aminés essentiels : ce sont des petites molécules comme la phénylalanine, le tryptophane etc
  • Les acides gras essentiels : il s’agit des oméga-3 et des oméga-6.

Tous ces éléments sont naturellement présents dans une alimentation variée et équilibrée. Que les choses soient donc claires : les personnes en bonne santé (a fortiori jeunes) ayant un régime équilibré n’ont pas besoin de prendre en plus des compléments alimentaires. Certains sont même reconnus comme toxiques dès que l’on dépasse un peu la dose recommandée, comme le sélénium. Mais ne jetons pas le bébé avec l’eau du bain. Des compléments alimentaires sont utiles dans certaines circonstances, notamment chez la femme enceinte (vitamine B9), ou pour des personnes carencées : troubles alimentaires (anorexie), alcoolisme (vitamine B1), carence martiale (fer), pathologies associées au vieillissement (vitamines D, A etc)…

Qu’en est-il maintenant des compléments alimentaires pour le cerveau ? Les médecins sont catégoriques : cela n’a aucun effet réel sur les performances intellectuelles, mis à part un effet placébo. Autrement dit, le seul effet de ces traitements est de faire croire au sujet qu’ils en ont un. Les escroqueries en la matière sont nombreuses : citons par exemple Phytalzéal ®, Bi-optimum ®, etc. Tous ces cocktails de molécules sont vendus avec une affirmation explicite d’effets sur les capacités mentales, « dans le cadre d’une alimentaire équilibrée » bien sûr (avec ça, allez savoir si l’effet est dû au médicament ou à l’hygiène de vie).

La dernière mode est matière de compléments alimentaires concerne les oméga-3, « bons pour le cœur, bons le corps, bons pour l’esprit » (la dernière de ces 3 allégations est fausse). Les omega-3 sont particulièrement intéressants pour améliorer les fonctions cardio-circulatoires. De plus, ils participent au bon développement du cerveau du fœtus et de l’enfant, et au ralentissement de son déclin après 30 ans. Néanmoins, ils n’amélioreront pas vos performances mentales, ni à court terme, ni à long terme : ils ne feront que ralentir le déclin physiologique. Notez par ailleurs, que plusieurs études ont définitivement éliminé les allégations d’effet des oméga-3 sur l’humeur (certains scientifiques leurs prêtaient des vertus antidépressives ou anxiolytiques).

Mon conseil est donc le suivant : ayez une alimentation équilibrée de façon à éviter les carences. Si vous êtes végétarien ou végétalien, renseignez-vous pour remplacer par des pilules ce que vous ne pourrez jamais trouver dans les végétaux, notamment la vitamine B12. Dans tous les cas, la présence de ces vitamines, oligo-éléments, acides aminés et acides gras essentiels dans votre organisme lui permet de fonctionner normalement et d’éviter certaines défaillances. Mais en aucun cas cela n’augmente vos performances intellectuelles.

Le cas des compléments alimentaires « spécial étudiant »

Il n’empêche que des étudiants se persuadent qu’ils ont besoin de ces pilules, augmentent les doses et prolongent les cures, à la plus grande joie des laboratoires pharmaceutiques qui eux n’ont pas besoin de se doper pour trouver des marchés toujours plus lucratifs. Etant donné la demande croissante, les laboratoires ont commencé à commercialiser des compléments alimentaires, tels que le Memoboost ®, censé améliorer la mémoire, et bien sûr vendu sans ordonnance. Mais le Memoboost ® n’est pas un médicament comme les autres… Vous connaissez des médicaments pour enfants, adulte, senior, hommes, femmes… indiqués en cas de fièvre, de douleur, d’insomnie, etc… . Découvrez maintenant les médicaments spéciaux « pour étudiant », indiqués en cas de « période d’examen » : qui dit nouveau marché dit obligatoirement nouveau type de malade (les étudiants) et nouvelle maladie (les examens !). Oui, en allant sur les sites de pharmacie en ligne, vous trouvez maintenant souvent une rubrique « études – examens », en plus des rubriques classiques (minceur, virilité, stress…).

Prenons l’exemple du Bioptimum ®, du laboratoire Boiron. A la base, ce laboratoire a créé deux médicaments : Bioptimum Stress ® et Bioptimum Mémoire ®. Mais avec la demande croissante des étudiants, voire même des lycéens, Boiron a sorti le « Pack spécial examen » (au modeste prix de 30 €), avec une boite de Bioptimum Stress ® et une de Bioptimum mémoire ®. Le laboratoire vous recommande de prendre « 2 comprimés par jour le matin, 25 jours avant la 1ère épreuve, pour optimiser la mémoire et la concentration, puis 4 comprimés par jour pendant 10 jours pour mieux gérer son stress ». A ce rythme-là, il faudra beaucoup de pilules, donc beaucoup d’argent passant de votre poche à celle de Boiron. Bien sûr, Boiron n’a pas testé l’efficacité de ces pilules : lisez ici leur composition. C’est un cocktail vitaminé classique, avec des oligo-éléments et des oméga-3. Bien sûr, comme tous les compléments alimentaires, « Bioptimum ne remplace pas une alimentation équilibrée et variée » (tout bon pharmacien vous le dira). Or, si vous avez une alimentation équilibrée et variée et que vous n’avez pas de carence, votre cerveau fonctionne normalement : l’absorption de tous ces compléments alimentaire sera au mieux inutile (votre intestin ne les absorbera pas, ou votre rein les éliminera dans l’urine), au pire dangereuse (vous pouvez par exemple vous retrouver en hypervitaminose, avec des problèmes systémiques parfois graves). Dans tous les cas, vous avez perdu votre temps et votre argent, pour le plus grand plaisir des laboratoires Boiron ®.

Ce qui est vrai pour le Bioptimum ® est vrai également pour les autres compléments alimentaires ne contenant qu’un cocktail de vitamines, oligoéléments et acides gras essentiels classiques, tels que

  • Metagenic Metastudent ®, qui selon le laboratoire Metagenic est « idéal pendant les examens »
  • Cognutril ®, du laboratoire Nutrisan
  • TonixX Plus ®, qui selon Ixx Pharma doit être pris « pendant la phase d’études préparatoires des examens et durant les examens, durant un long trajet en voiture, lors de périodes de tension et pression mentale intense ».

Après les vitamines, les oligo-éléments et plus récemment les oméga-3, la dernière mode en matière de médicament est la phytothérapie, comprenez le « traitement par les plantes ». Comme toujours, les laboratoires pharmaceutiques ont trouvé là un nouvel argument marketing : ainsi, on retrouve des plantes dans beaucoup de compléments alimentaires.

Avant d’aller plus loin, je me permets une petite digression sur la phytothérapie en général : phytothérapie ne signifie pas « médecine douce » !

  • Les poisons les plus toxiques au monde sont parfaitement naturels, produits par des jolies petites plantes, des petites animaux colorés tous mignons etc. Citons la morphine, le curare, la digitaline, la conine (dans la fameuse cigüe qui a tué Socrate), les toxines animales (par exemple la tétrodotoxine)…
  • Certaines molécules naturelles ont des effets bien réels, parfois très dangereux en cas de surdosage (comme le Ginseng), voire même à doses normales : attention aux « potions de virilité », qui comme le Viagra (un médicament) peuvent causer de graves problèmes cardiovasculaires.
  • L’utilisation d’extraits de plante, plutôt que des molécules identiques synthétisées, pose un gros problème : les extraits de plantes contiennent d’autres molécules, parfois mal connues, qui peuvent être toxiques, présenter une interaction avec la molécule d’intérêt etc. Au contraire, une molécule de synthèse est isolée, purifiée : on sait ainsi très précisément ce que l’on a mis dans le médicament. Le problème des extraits de plante a récemment été soulevé par UFC-Que-Choisir, par exemple dans le cas de la levure de riz rouge, que certaines personnes utilisent pour remplacer les hypocholestérolémiants classiques : le danger est tel que depuis fin 2012, UFC-que-choisir a saisi la Haute Autorité de Santé (Lisez l’article de l’UFC-que-choisir).

En bref, retenez que les arguments « bio », « plante », « médecine traditionnelle »… est avant tout un argument marketing. Sans les diaboliser, ne voyez pas dans les médicaments à base de plante des effets meilleurs que les médicaments de synthèse : au contraire, ils ont parfois tendance à être moins surveillés par les agences de surveillance des médicaments, moins « décortiqués » par les scientifiques, et donc à présenter plus de risques que les médicaments synthétiques.

Les compléments alimentaires pour l’activité cérébrale n’y échappent pas : les laboratoires y mettent maintenant des extraits de plantes, souvent issus de la médecine traditionnelle asiatique. Etant donné l’engouement pour ce genre de médicaments, je vais m’attarder davantage sur les différents composants utilisés et leurs effets potentiels.

Prenons le cas du Memoboost ®. Le laboratoire Arkopharma, leader français sur le marché des compléments alimentaires, a bien compris quels sont les principaux demandeurs de ce genre de pilule : le nom complet du médicament est « Memoboost ETUDIANT Gingko Bacopa », et la notice précise

  • qu’il est indiqué pour « la mémoire, la concentration, et les étudiants »
  • qu’il permet de « stimuler vos capacités intellectuelles en cas de surmenage ou période d’examen »
  • qu’il contient des principes actifs « qui contribuent à stimuler les capacités intellectuelles en favorisant concentration et mémorisation »
  • qu’il faut doubler les doses (4 gélules par jour au lieu de 2) en période « d’activité intellectuelle intense » (comprenez qu’il faut en acheter 2 fois plus)

La dernière ligne de la notice est on ne peut plus explicite : « le Memoboost est particulièrement recommandé en période de surmenage intellectuel ou d’examen » (lisez vous-même la description du médicament par son laboratoire ici). Notez qu’il s’agit là d’un aspect purement et strictement marketing, et qu’Arkopharma s’est trouvé une deuxième clientèle en manque de mémoire : le laboratoire vend aussi Memoboost Senior®, avec quasi la même composition, préconisant des cures de 1 à 3 mois (2 gélules par jour).

Bien sûr, Arkopharma n’a pas testé ses effets, car il ne contient que des vitamines et oligo-éléments classiques, du Ginkgo biloba (50mg) et du Bacopa (150mg), qui sont deux plantes popularisée par la mode des phytothérapies et des médecines traditionnelles asiatiques. Vous retrouvez ces plantes dans beaucoup de médicaments différents, et pas uniquement pour les capacités mentales. Mais quels sont réellement leurs effets ?

Les extraits de Ginkgo biloba, utilisés dans la médecine chinoise, augmentent le débit sanguin, notamment au niveau cérébral mais leurs prétendus effets sur les performances mentales n’ont jamais été prouvés : depuis plus de 10 ans, leurs pseudo-vertus n’ont de cesse d’être remises en question. En effet, ce sont de puissant antioxydants, autrement dit ils luttent contre certains mécanismes de vieillissement cellulaire (pas contre tous !). On pensait que ces extraits auraient des vertus protectrices contre la démence, la maladie d’Alzheimer, le vieillissement des neurones…, mais toutes les études menées depuis les années 2000 n’ont montré aucun de ces effets (par exemple, cette étude de 2009 ne montre aucun effet sur les fonctions cognitives de l’adulte vieillissant). En 2012 ont été publiés les résultats d’une méta-analyse très sérieuse, qui fait la synthèse de l’ensemble des études portant sur les effets du Gingko biloba sur les performances mentales : elle établit clairement que les effets sur la mémoire et les capacités de concentration et de réflexion sont nuls, et ce quel que soit l’âge ou la dose (lire l’étude).

Quant au Bacopa monnieri, il était à l’origine utilisé dans la médecine indienne contre l’asthme et l’épilepsie. Depuis les années 1960, on pense que les extraits de Bacopa améliorent la mémoire, notamment chez les personnes âgées. Mais contrairement au Ginkgo biloba, les quelques études sérieuses sur les effets du Bacopa sur les capacités mentales des personnes âgées ont montré des résultats contradictoires (exemple). Mais ce qui nous intéresse dans cet article, ce ne sont pas les personnes âgées mais les étudiants, autrement dit de jeunes adultes en bonne santé. Justement, en 2001, une étude a été menée sur des adultes en bonne santé, auxquels on a donné au moins 300mg de Bacopa (soit deux fois la quantité trouvée dans une gélule de Memoboost ®), pendant 3 mois : il n’y a eu aucune amélioration, ni de la mémoire à court terme, ni de la mémoire à long terme, de l’attention, ou même de l’état psychologique (l’anxiété par exemple). La seule amélioration notée est la capacité à retenir des paires de mots pendant quelques minutes. (lisez l’étude)

Pour finir, comme le Memoboost ® associe les 2 extraits de plante, j’ai trouvé intéressant de parler d’une autre étude, indépendante, datant de 2004 : elle a consisté à regarder les effets d’une prise quotidienne de 300mg de Bacopa monnieri associée à 120mg de Gingko biloba (soit un peu plus que ce que l’on trouve dans deux gélules de Memoboost®) chez des adultes en bonne santé, pendant plusieurs semaines. Les résultats n’ont montré aucune efficacité, ni sur la mémoire, ni sur les capacités cognitives, ni sur l’attention, ni sur les tâches exécutives, ni sur la capacité à résoudre des problèmes etc… . (lisez l’étude)

Mais alors, pourquoi utilise-t-on le Bacopa et le Ginkgo biloba ? Ce sont des plantes intéressantes pour leurs propriétés anti-oxydantes et surtout cardiovasculaires (par exemple pour les maux de têtes et acouphènes dûs à un problème vasculaire), propriétés souvent utilisées dans les médecines traditionnelles asiatiques. Néanmoins, elles n’ont a priori aucun intérêt pour améliorer la mémoire ou les capacités mentales (sauf si vous avez besoin de retenir des listes de mots pendant quelques minutes 🙂 ).

Pourtant, Arkopharma n’hésite pas à promettre monts et merveilles, et surtout réussite d’examen, aux étudiants en panique pendant leurs révisions, qui hélas ne prennent pas toujours l’initiative de lire les études sur les composants du médicament (ce qui n’est pas mon cas). A raison de 4 gélules par jour en période d’examen, vous devrez débourser 6,90€ par semaine pour ce placebo impur (2 gélules par jour pendant 3 mois pour les séniors, soit plus de 40€ au total).

Sachant que la poudre de Bacopa et de Ginkgo biloba se négocie dans les pays asiatiques à 20€/kg en moyenne, il y en coutera 0,12€ pour 30 gélules de 200mg de Bacopa et Gingko biloba, soit 1 boite de Memoboost vendue 6,90€. Certes, il faut ajouter à cela le cout de fabrication et les autres composants (vitamines, oligo-éléments, oméga-3), néanmoins, cela vous permet de vous faire une idée des marges réalisées par Arkopharma.

Conclusion

On peut donc dire objectivement que les compléments alimentaires, même ceux à base de Bacopa et de Ginkgo biloba, n’ont pas plus d’effets sur les performances cérébrales que n’en avaient les élixirs et autres poudres de perlimpinpin au début du siècle.

Ce sont des placebos impurs : ce n’est pas une expression péjorative de ma part, mais un terme utilisé couramment en pharmacologie pour désigner un médicament actif, mais inefficace sur la pathologie pour laquelle on l’a prescrit ; par exemple, prescrire un médicament améliorant la circulation sanguine pour améliorer les performances intellectuelles.

Néanmoins, leur effet placébo est bel est bien réel, et s’appuie sur trois éléments fondamentaux :

  • La publicité et le marketing persuasifs faits par le laboratoire et les vendeurs, ne serait-ce que sur la boite et la notice (rappelez-vous la notice du Memoboost Etudiant ®) : cette publicité met souvent l’accent sur les concepts aujourd’hui en vogue, comme le traitement par les plantes, la médecine traditionnelle asiatique etc…. mais aussi sur des aspects soi-disant scientifiques
  • La réputation et la popularité du médicament, qui fait office de marketing viral (autrement dit ce sont les consommateurs qui se font passer le message) : si vous allez sur les forums d’étudiant, la plupart sont emballés par les compléments alimentaires comme le Memoboost ® et le recommandent aux autres
  • L’absence de médiatisation sur des études qui le démolissent. Les études indépendantes et sérieuses sont publiées et reconnues par la communauté scientifique, néanmoins rares sont ceux qui vérifient la liste des composants des médicaments et lisent les études sur leur efficacité (j’ai bien dit de lire les ETUDES SUR LES COMPOSANTS et pas les articles de presse sur le produit ou sur les composants, qui bien souvent tordent les résultats faute de les comprendre)
  • Notez enfin que plus un placebo est cher, plus l’effet placebo est important (lisez l’étude).

Encore une fois, ces laboratoires utilisent les techniques des charlatans des XVIIIe et XIXe siècles.

Dans cet article, ma principale cible est le Memoboost ®, mais sachez que beaucoup d’autres compléments alimentaires prétendent améliorer vos capacités intellectuelles. La très grande majorité d’entre eux (pour ne pas dire la totalité) n’ont pas plus d’efficacité que le Memoboost®. Dans tous les cas, lisez bien ce que contiennent les pilules, et surtout lisez bien la notice. Sachez par exemple que tout ce qui contient du Ginkgo biloba est formellement déconseillé aux personnes sous anticoagulants, aux femmes enceintes, etc.

Tout cela ne serait rien de plus qu’une escroquerie, si ces compléments alimentaires ne poussaient pas les étudiants à la polyconsommation et donc en amenait certains vers la dépendance psychique, simplement en leur mettant le pied à l’étrier. Non seulement des étudiants pensent avoir besoin de leurs compléments alimentaires, mais en plus ils augmentent les doses, prolongent les cures, et vont petit à petit se tourner vers des molécules dont les effets stimulants sont cette fois ci bien réels, à commencer par les comprimés antiasthéniques (anti-fatigue), puis les smart-drugs, plus efficaces sur les performances cognitives. Ces molécules feront l’objet de mon prochain article.

Lisez la suite de l’article ici :

Les pilules de la réussite (2/2) – Les psychostimulants

Par Lexane Sirac

J'ai grandi au Québec puis à Grenoble. Après avoir obtenu mon bac à 15 ans, j'ai arrêté mes études pour faire du sport à haut niveau jusqu'à ce qu'une blessure me renvoie sur les bancs de l'école. J'ai fondé Réussir Mes Études en janvier 2012, avant d'intégrer l'emlyon et de décider de faire de l'écriture mon métier.

4 réponses sur « Les pilules de la réussite (1/2) – Le dopage placébo »

Bonjour,
J’ai failli tomber de ma chaise en lisant cet article ! Comme le dit, ci-dessus, Vincent, tout ce qui est écrit, plus haut, est complètement à charge, et donc, à mes yeux, forcément partial.
J’en suis à me demander quel est le laboratoire pharmaceutique qui a écrit cet article … Car, à vouloir démolir, à ce point, les traitements alternatifs, j’en déduis que quelqu’un y a forcément un intérêt financier personnel !
Heureusement, il existe des professionnels sérieux auxquels je fais appel, en cas de besoin ; et, surtout, je garde mon sens critique lorsque je consulte internet où l’on peut trouver le meilleur comme le pire…

Article intéressant mais complètement à charge… Vous parlez de la levure de riz rouge qui est tout de même un cas particulier pour traiter l’hypercholestérolemie dans un article concernant la mémoire… et cette levure a permis à de nombreuses personnes de se passer des médicaments ayant bcp plus d’effets indésirables.
Vous poussez aussi le bouchon quand vous nous dites que prendre un extrait de plante peut être plus dangereux qu’une molécule de synthèse additionnée d’excipients (conservateurs, colorants…) !!! Alors ne mangeons plus de légumes (ce sont bien des plantes non ?) ça pourrait être dangereux !!!
Certe bcp de produits sont plus placebo qu’autre chose mais de là à tout dénigrer…

J’avais quelques doutes sur les compléments alimentaires de ce type, mais maintenant c’est beaucoup plus clair.
Merci pour cet article.

Merci pour votre article. Et, il n’existe pas non plus de compléments estampillés « Amélioration des performances sportives »!

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