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De la prépa à la fac : une libération ?

Mon but dans cet article n’est pas de faire l’apologie de tel ou tel système de formation, d’abord parce que leurs vocations sont différentes ; mais seulement de voir comment, personnellement, j’ai vécu ma CPGE scientifique et mon passage en université en L1 pour faire de la sociologie.

La prépa, un rythme soutenu et un suivi constant

J’ai effectué ma prépa BCPST (Biologie Chimie Physique et Sciences de la Terre) sur Paris alors que je vivais chez ma mère, en région parisienne. J’avais environ une heure de trajet en train et métro.

La prépa c’est une trentaine d’heures de cours par semaine, sans compter les 2 heures de colle (interrogations orales) par semaine, les DS de 2 à 4 heures le samedi matin, et bien entendu tout le travail personnel effectué la semaine et le dimanche. C’est un volume horaire important auquel on lui attribue bien souvent « la fin de la vie sociale », ce qui est juste dans le sens où la prépa requiert un investissement de travail constant qui laisse peu de temps aux loisirs et sorties. Bien entendu cela n’empêche en rien ces activités, mais cela les réduit inévitablement. J’ai personnellement un peu souffert de ce manque de temps libre car cela renforçait mon sentiment de culpabilité lorsque je ne travaillais pas. Le volume horaire important a beaucoup pesé sur mon moral et mon bien-être : j’étais souvent très fatiguée, et ainsi moins productive. J’essayais de rompre ce cercle vicieux en marchant le matin au lieu de prendre le métro pour me dégourdir le corps et l’esprit, ou en multipliant les micro-siestes de 20 minutes. Cela m’a pas mal aidé mais je ne me sentais pas pleinement maîtresse de moi-même. Je n’étais pas du tout épanouie et je croyais difficilement en moi.

En prépa, on est une classe d’une quarantaine d’élèves environ, et une vingtaine en TPs et TDs. L’effectif est réduit ; les professeurs connaissent tous nos noms et nos profils. Ils corrigent eux-mêmes nos copies, qui ne sont pas anonymes, et suivent également nos progrès lors des colles. Les professeurs viennent nous voir s’ils sentent une baisse générale et nous mettent en garde. Ils sont de manière générale très attentifs et très accessibles, certains se targuant même d’être « nos deuxièmes parents ». Résultat, entre les professeurs et nos camarades avec qui on est très soudés, la prépa devient vite une famille. C’est également un aspect qui aide dans les moments difficiles où on a la sensation de juste devoir engranger un maximum de connaissances (et d’ailleurs, on apprend aussi surtout à valoriser ces connaissances).

Le système de la prépa nous impose plusieurs choses : assister à tous les cours sous peine de prendre rapidement beaucoup de retard, rendre tous les DMs, effectuer toutes ses colles, etc. Bien entendu les absences justifiées sont tolérées, mais les absences sont remarquées et consignées. On fonctionne encore, comme au lycée, avec des bulletins et des appréciations personnelles, sur deux semestres. Bref, tout est fait pour que personne ne soit anonyme et soit laissé à la dérive sans intervention.

J’ai tiré ainsi beaucoup de très bonnes choses de ma prépa bio car j’ai appris à travailler sous la pression et sous des contraintes diverses de temps, de fatigue, de déprime, du stress des transports, etc. J’ai appris à me dépasser, à rédiger efficacement lors des dissertations (en BCPST, on en a pas mal), à improviser si je suis prise au dépourvue en colle, à planifier un projet en groupe, à connaître ma manière de réviser, mes réactions aux contraintes… Je me suis rendue compte de toute la valeur de cet apprentissage sur moi-même que 2 ans plus tard, en faculté, après une 1ère année en école d’ingénieurs.

La fac, une flexibilité et de nouvelles libertés

Le volume horaire de la fac ? 20 heures, et pour moi c’est plus de l’ordre de 15 heures car j’ai pu faire valider certains UEs comme l’informatique ou l’anglais. J’ai donc ainsi retrouvé beaucoup de temps pour ce qui contribue à mon bien-être moral et ainsi à ma motivation (mais aussi pour des choses de la vie courante !) : lire, dessiner, écrire, sortir, prendre des RDVs médicaux, m’occuper de papiers, faire les courses, etc. J’ai décidé de ne pas travailler le week-end (sauf cas particuliers) car cela me permet d’avoir une vraie coupure. La semaine j’organise ainsi mon temps de travail selon ma productivité et mes envies. Je ne suis plus face à la seule option de devoir réviser le soir de 20h30 à 23h30 voire plus.

Une des choses que j’ai clairement apprécié en entrant à l’université en L1, c’est la liberté. Encore une fois je parle de mon cas personnel, car je sais que certaines personnes trouvent nécessaires d’être suivies, d’avoir un contrôle régulier sur leur travail car cela les motive à travailler. Pour ma part c’est tout le contraire. J’apprécie le fait d’être autonome et de me gérer moi-même, car c’est ainsi que je trouve que l’on devient responsable et que l’on devient familier de sa manière de fonctionner « sans barrières ». Et surtout, on peut totalement s’adapter comme on veut au système de la fac, sans forcément rentrer dans un « moule » comme c’est le cas en prépa. Je ne vais pas à ce cours magistral car je préfère bosser le PDF toute seule ? C’est mon problème. Je décide de ne pas venir toute la semaine car je suis malade ? C’est mon problème. Je rends un TD supplémentaire ? C’est mon problème. Je sèche ? Bon, je pense que vous avez compris. Tous mes actes, c’est à moi de les assumer. La sanction existe toujours, seulement elle a une forme différente. De même, si on a une question ou un problème, c’est à nous d’aller consulter le professeur, et non pas l’inverse. L’initiative est primordiale, car si certains CMs sont plus impersonnels, les professeurs restent complètement accessibles en TDs.

Bien que je sois en L1 de sociologie, une discipline a priori très éloignée de ma formation initiale, il s’est vite avéré que j’avais acquis en prépa d’excellents atouts pour celle-ci. J’ai notamment pu expérimenter ces derniers en partiel, lors de dissertations où j’étais très efficace : pas beaucoup de temps sur le brouillon, et un temps de rédaction limité car je suis désormais très familière des attentes sur la forme – et le fond. Résultat, je sortais bien une demi-heure en avance, sans le sentiment d’avoir bâclé, et avec la meilleure note… Cela m’a agréablement surprise. La prépa BCPST, et la biologie particulièrement, m’a en effet appris à développer une pensée sous une forme très logique, comme une démonstration scientifique.

En parlant d’ailleurs plus de matière, passer de la biologie à de la sociologie est très intéressant car il y a beaucoup de similitudes entre ces deux disciplines : des raisonnements et méthodes d’observation similaires, des emprunts et des remises en cause de Darwin, des thèmes transversaux… Bref, aborder la sociologie avec mes acquis de biologie, c’est un regard qui me passionne. Un autre avantage de la fac : pouvoir sélectionner 2 UEs d’ouverture dans un catalogue qui ne concerne pas notre dominante. Par exemple je peux choisir « Genre et langage », « Musique de films », « Psychologie de la communication », « Expression écrite », « Anglais avancé »… Le choix est vaste (se limitant seulement aux lettres et sciences humaines, on ne peut pas prendre de la chimie, du droit…) et permet, comme annoncé, de s’ouvrir à d’autres disciplines et de personnaliser son parcours. C’est aussi une très bonne chose pour les personnes souhaitant se réorienter en cours d’année.

On ne « perd » jamais d’années !

La méthode, l’apprentissage de soi, l’expérience, les connaissances… C’est pour ces raisons que je soutiens aux gens autour de moi que ma prépa n’aura jamais été deux ans de perdus, malgré mon revirement de discipline et de type de formation. La prépa a contribué à me fortifier, même si sur le moment je n’avais pas le recul nécessaire pour en prendre conscience. Il n’y a jamais de parcours incohérents à mon sens, quels que soient les virages effectués, et mon exemple n’en est qu’un parmi d’autres.

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